Histoire de la musique afro américaine , des plantations à la Maison blanche

Les esclaves déportés sur le continent nord-américain mêlent à leurs chants ancestraux la musique de leurs maîtres, qu’ils acclimatent. De cette rencontre entre la tradition africaine et les musiques savantes, populaires et religieuses occidentales vont naître des formes d’expression nouvelles : les Work songs, les métayers, le blues, les negro spirituals, le jazz, Soul music et enfin le Rap. Des chants de travail (Work songs) sur les plantations au Rap d’aujourd’hui, cette recherche nous plonge dans les coulisses de l’histoire noire américaine.

Dans les champs de plantation, il fallait, pour les Africains déportés, trouver quelque chose qui leur laisse le souvenir de l’Afrique et supporter la douleur inouïe qu’ils ressentaient pendant le travail. Et le choix s’est porté sur la musique.

Les Work songs, ce sont des chants “a cappella” interprétés essentiellement dans les champs de coton. Dans une recherche d’harmonie et d’unité, ils accompagnent le mouvement et l’effort des esclaves. Échanges d’appels et de réponses entre un soliste et le reste du groupe en chœur, ces chants, construits sur des rythmes scandés et répétitifs, emploient des paroles éloignées de l’activité des esclaves pour soutenir l’effort tout en tentant d’oublier le travail forcé.

De 1861 à 1865, les metayers et les Hollers profiteront de la guerre civile qui exigea l’abolition de l’esclavage et la permission aux Noirs d’avoir des terres cultivables même s’ils devraient reverser 80 à 90% des rendements aux propriétaires blancs. Les Work songs laissent alors la place aux Hollers ou Hollies, cris solitaires auxquels répondait un travailleur voisin, puis un autre et ainsi de suite. Les esclaves affranchis devenus métayers n’étaient plus esclaves et les Hollers étaient témoins.

De la naissance du Negro Spiritual au Blues, en passant par l’émancipation des Noirs

Au XVIII siècle, le Noir évangélisé et les “Negro Sipirituals”, eux profiteront de l’évangélisation et l’accès aux lieux de culte de leur maitre blanc et l’apparition d’églises noires, pour adopter le style musical occidental. Les chants et cantiques occidentaux se transforment en Negro spirituals, récupérés par les esclaves qui les ont adaptés. Les maîtres considéraient les Negro spirituals comme des chants de résignation alors qu’ils étaient porteurs de messages d’espoir perceptibles par les esclaves.Les Negro spirituals ont marqué l’évolution des Noirs vers l’évangélisation, mais aussi une étape vers l’ émancipation, car cette musique, au service des cultes des Noirs, a initié un rejet de la culture blanche. Le Gospel, chant religieux chrétien, fera suite au Negro Spirituals dans les années 1920/1930.

Le Blues fut créé par des Noirs rejetés, isolés de la société américaine et serait né de la fusion des Work songs, des hollers, des Negro spirituals ainsi que d’éléments culturels européens tels que les ballades anglo-écossaises. Cette musique leur a permis de raconter leur vie et leurs expériences ainsi que les injustices subies. Francis Dordor, dans la revue Volume de l’été 2008 rappelle : « Les arbres du Sud ­portent un fruit étrange. Du sang sur les feuilles et du sang sur les racines, des corps noirs se balançant dans le vent du Sud”. Au début du XXème siècle, l’avènement du jazz permet une reconnaissance de la culture afro-américaine. Les musiques dont il est issu sont plus anciennes et résultent de traditions orales africaines, enrichies par le courant euro-américain. Une fois découvert, le Jazz, musique cosmopolite, a permis de faire tomber des barrières entre  Blancs et Noirs et de fusionner plusieurs cultures en une seule, celle du jazz. Les années 1950/1960 voient émerger aux Etats-Unis le mouvement des droits civiques qui vise à instaurer l’égalité avec les Noirs Américains. Influencée notamment par le Rythm and Blues et le Gospel, la Soul Music (musique de l’âme), apparaît dès la fin des années 1950 et met en avant la culture et la fierté de la communauté afro-américaine. Elle est utilisée comme moyen d’expression dans cette quête d’égalité. La fin des années 1960 est marquée par l’assassinat de deux leaders Noirs : Malcolm X (1965) et Martin Luther King (1968).

Le  rap,  du ghetto au milieu mondain

C’est en 1979 que le monde découvre cette forme musicale avec le tube “Rapper’s delight”  des  Sugarhill Gang: cette musique qui, au départ, relatait des anecdotes avec des  punchlines festives, vantardes et matérialistes va se transformer, dans les années 1980, sous l’administration Reagan, en véritable dénonciation de la tiers-mondialisation des ghettos. Le titre “Fight the Power”  du groupe “Public Enemy” en est une illustration. Les années 1990 ont vu l’explosion du phénomène Rap aux Etats-Unis ainsi qu’aux quatre coins de la planète.Ce courant musical est même devenu, pour certains, une opportunité de sortie de la pauvreté  pour vivre la vie facile décrite par de nombreux rappeurs; tandis que, pour d’autres, elle symbolise l’expression culturelle des opprimés. Depuis une quarantaine d’années, le rap, musique de révolte et de contestation, s’est embourgeoisé mais demeure porteur d’espoir.

Sources: nofi.média, L’Humanité, OpenEdition Book

DAKISSAGA Lucien (Stagiaire)

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