Insuffisance Rénale : Comment éviter cette maladie ?

slide_7Le phénomène de l’insuffisance rénale est de plus en plus répandu. Pour en savoir davantage sur cette maladie et surtout comment l’éviter, nous avons rencontré un spécialiste du domaine. Il s’agit de Dr Tiémoko Oumar Lautholy SANOU, président de l’association AURA VITA qui lutte pour endiguer cette maladie.

SCI : Quelles sont les manifestations de la maladie ?

Dr : Le diagnostic d’insuffisance rénale est fait lorsque les deux reins sont affectés. La manifestation la plus fréquente se trouve au plan urinaire. Le sujet peut avoir une oligurie, c’est-à-dire que la quantité d’urine par jour est inférieure à 400 ml. Il y a également l’anurie où le sujet peut passer une journée sans uriner. Dans certains cas, on peut avoir une polyurie, c’est-à-dire que le sujet urine plus que d’habitude. Toutes ces formes sont des anomalies qui doivent interpeller le médecin à orienter vers cette maladie. Mais il y a d’autres signes pendant la complication et qui dépendent des causes.

SCI : Quels sont les sujets les plus exposés à la maladie ?

Dr : Ce sont les sujets portant une hypertension artérielle ou le diabète pour les personnes âgées. C’est ce qui est fréquent. Pour les enfants, ce sont les infections, les drépanocytaires, les enfants exposés aux infections à répétition tels que les infections de sphère ORL à répétition. Ce sont les plus à risque ; surtout les femmes enceintes qui font une maladie qui ressemble à l’insuffisance rénale.

SCI : Quels sont les facteurs à risque de la maladie ?

Dr : Aujourd’hui nous parlons de l’obésité. L’obésité est devenue une entité à part qui va entrainer beaucoup de répercussions négatives sur l’organisme. Il y a aussi les infections, surtout en milieu tropical, le paludisme sous plusieurs formes comme le paludisme hémoglobinurique. C’est une allergie à la quinine, et le rein ne filtre plus bien les déchets, ce qui donne une couleur chocolatée aux urines et c’est mortel. Il y a donc les infections virales, les infections bactériennes, les infections parasitaires, infections micro-bactériennes.

SCI : Que dit-on lorsqu’un seul rein est touché ?

Dr : Si un seul rein est touché, l’autre peut fonctionner correctement et on ne parle pas d’insuffisance rénale. Par exemple, lorsqu’un individu a une tumeur au rein gauche, il va uriner normalement. Ce qui peut l’amener en consultation c’est peut-être une douleur profonde à gauche qui ne finit pas malgré les traitements. Et c’est après l’échographie qu’on pourra dire qu’il y a une tumeur au rein gauche. Mais la fonction rénale est conservée.

dr-tiemoko-oumar-lautholy-sanouSCI : Quels sont les moyens curatifs de la maladie ?

Dr : Pour l’insuffisance rénale aigue, d’habitude c’est réversible, sauf dans le cas des infections. Tant que la cause infectieuse est traitée, ça ne revient pas. Les moyens curatifs, ce sont les médicaments comprimés ou injectables, des corticoïdes qu’on utilise souvent. Il y a d’autres traitements qu’on appelle mesures hygiéno-diététiques. L’hygiène, c’est le sommeil, la propreté, l’hygiène de vie, le sport. Le sport peut résoudre 50% de beaucoup de maladies.

Après les mesures hygiéno-diététiques, il y a les mesures médicamenteuses qu’on peut utiliser pour traiter. Et la dernière mesure aujourd’hui qu’on appelle couramment la dialyse. Il s’agit de l’hémodialyse vu qu’il y en a deux types. Il y a l’hémodialyse, et la dialyse péritonéale. Péritoine, c’est une membrane qui couvre les intestins au niveau de l’abdomen. Cette membrane a deux feuilles et entres les deux feuilles il y a du liquide qui passe. C’est une cavité virtuelle qui ne se remarque que lorsqu’il y a un trop plein de liquide. En cas d’insuffisance rénale chronique ou aigue, on peut utiliser ces méthodes-là.

SCI : En quoi consistent ces traitements par dialyse ?

Dr : Les agents de santé qui s’en occupent sont appelés des néphrologues. Il s’agit de remplacer le rôle du rein par un appareil dans lequel le sang va circuler et rentrer dans le corps. L’appareil va filtrer le sang. La fréquence c’est chaque 48 heure ; mais au Burkina on fait chaque trois jours. S’il s’agit d’une insuffisance rénale chronique, le sujet est condamné à utiliser cette machine d’épuration du sang, au risque d’accumulation de déchets dans le sang, ce qui entraine la mort.

SCI : En combien de temps peut-on ramener le rein à l’état fonctionnel ?

Dr : Au niveau de la dialyse le travail fait par la machine met le rein au repos et lui permet de redémarrer, si c’est encore possible. Mais on ne peut pas définir en combien de temps on va ramener le rein. Dès qu’on démarre le traitement, ça dépend des individus et de l’atteinte rénale. Pour un rein faiblement touché, dès que vous démarrez le traitement et que vous arrivez à éradiquer la cause (si la cause est qu’il y a une tumeur qui bloque en aval), le rein se remettra à fonctionner normalement. On dira donc que cela dépend de l’individu, l’éradication de la cause et les atteintes rénales.

 SCI : Quels sont les moyens de prévention de la maladie ?

Dr : Au Burkina Faso, c’est d’abord l’hygiène de vie. Ensuite, c’est d’éviter tout médicament non prescrit par un médecin ou un agent de santé. Nous constatons aussi que chez les jeunes l’insuffisance rénale est due à la consommation de stupéfiants. C’est également dû à la consommation de décoctions (plantes qui n’ont pas fait leur preuve scientifique, et utilisées sans dose) ou des mélanges qui se font et qui ne correspondent pas. Du coup quand l’individu utilise, ça passe dans le sang et quand ça passe au niveau du tamis ça détruit ce dernier. C’est comme faire passer de l’acide dans un tamis en tissu. Et l’individu reste pendant plusieurs jours sans uriner.

SCI : Y a-t-il d’autres structures spécialisées dans le diagnostic, le traitement et le suivi des malades atteints d’insuffisance rénale en dehors de nos hôpitaux ?

Dr : Il n’y en a pas pour le moment. Même au niveau des médecins, ce ne sont pas tous qui sont aptes à faire le traitement, le diagnostic étant biologique donc faisable par tous.

SCI:Votre association accentue son travail à l’endroit des enfants. Est-ce dire que la maladie sévie plus chez enfants ?

Dr : Nous avons choisi ce volet parce que nous sentons que c’est un peu négligé. C’est vraiment fréquent chez les enfants, autant que chez les adultes. Nous avons accompagné un étudiant pour sa thèse de doctorat sur l’insuffisance rénale en milieu hospitalier, dans le service de médecine interne et le service des maladies infectieuses. Sur six (06) mois, il a pu avoir quatre-vingt-cinq (85) cas d’insuffisance rénale dont soixante-neuf (69) étaient des insuffisances rénales chroniques et seize (16) aigues. Il a perdu 1/3 des malades. Ces chiffres sont des statistiques faits sur six (06) mois sur les malades qui viennent à l’hôpital, sans compter ceux qui décèdent dans les périphéries, les CSPS, ceux qui ne reçoivent pas de traitement par faute de diagnostic, par erreur de diagnostic, manque de moyens ou méconnaissance des symptômes. On peut dire que la fréquence est élevée, à cause des stupéfiants, les drogues, les médicaments de la rue, les produits traditionnels utilisés en abus. Il y a également les maladies générales comme le diabète, l’hypertension artérielle, la goutte, qui vont attaquer le rein.

                                                                                            Nicole OUEDRAOGO pour SCI

 

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